Deuxième thème : les relations ambiguës entre art et pouvoir
C’est dans un premier temps grâce à deux spectacles joués à Nancy que ce thème a été exploré.
D’abord une pièce de théâtre : Tableau d’une exécution de Howard Barker (10 et 11 janvier au Théâtre de La Manufacture). En effet le dilemme auquel l’ «héroïne », une artiste, est confrontée est le suivant : flatter le pouvoir, réaliser un tableau de propagande célébrant une victoire militaire de Venise sur les Turcs (la bataille de Lépante) ou dire la « vérité » en défiant la censure ? Les élèves ont beaucoup apprécié cette pièce contemporaine exempte de tout manichéisme qui leur avait été présentée avant le jour du spectacle par Madame Brencklé, chargée de communication au Théâtre de la Manufacture. La semaine suivante, une visite du Musée des Beaux-Arts de Nancy a permis aux élèves d’observer plusieurs tableaux illustrant les relations complexes entre art et pouvoir.
Ensuite, les membres de nos groupes de LS ont étudié un opéra, le Coq d’or de Rimski-Korsakov (joué le 12 mars à l’Opéra de Lorraine). Dans cette œuvre, l’arbitraire et la démesure du pouvoir sont dénoncés par le biais d’un conte populaire russe. En effet, Rimski-Korsakov tente de déjouer la censure dans un contexte spécifique: la fin du règne de Nicolas II en Russie. A cette époque, le régime autocratique est fragilisé par la défaite militaire infligée par le Japon (guerre de 1904- 1905) et la montée de la contestation intérieure (révolution avortée de 1905). L’étude de cette œuvre s’inscrivant dans un parcours opéra, les élèves ont bénéficié, avant la représentation, d’une visite guidée de l’Opéra de Nancy et ont assisté à une répétition des artistes durant une heure et demie, quelques jours avant le spectacle. Ils ont pu ainsi appréhender la diversité des métiers de la scène mais aussi l’ampleur et la précision du travail réalisé par les artistes en amont de la représentation proprement dite. L’œuvre, tour à tour satirique et lyrique, et sa mise en scène, dépouillée et poétique ont été très appréciées par nos jeunes spectateurs.
Ces spectacles ont donné lieu à des échanges fructueux entre les élèves. En effet, l’analyse des œuvres part toujours des impressions et remarques exprimées par ceux-ci, et participe à la compréhension des relations que divers régimes (autoritaires ou démocratiques) ont pu entretenir avec L’ART EN GENERAL ET l’architecture EN PARTICULIER au cours de l’histoire.
Les élèves ont ensuite assisté à la projection d’un documentaire de la série «Architectures» (ARTE) consacré au Palais des réceptions et des congrès de Rome, réalisation de l’architecte Adalberto Libera, chef de file du mouvement moderne en Italie, pour le régime mussolinien. Ce bâtiment apparaît en effet comme un compromis entre les préoccupations esthétiques de l’artiste et les exigences du régime totalitaire.
Emmanuel Ska et Agnès Crave